I’m a free bitch baby

Hier j’ai entendu une discussion sur le bienfondé ou pas de légaliser le travail des « assistant(e)s sexuel(le)s ». Pour faire court, les assistant(e)s sexuel(le)s sont  des personnes que des handicapés payent afin d’avoir des relations sexuelles. Vu le nom me direz-vous, on se doute bien que ce n’est pas pour améliorer de manière significative leurs résultats de bridge.

Cette profession est légale dans beaucoup de pays, à l’exception de la France, et le film « the sessions » traitant de ce sujet met sur le devant de la scène un débat peu connu et dérangeant. En règle générale, tout ce qui traite de près ou de loin de la chambre à coucher des individus, nous met mal à l’aise. Bienvenue dans un monde ou tuer des gens sans l’ombre d’un scrupule vous assurera une notoriété macabre, mais ou le simple fait de dire b*tch vous lancera la censure aux fesses. Ça me fait d’ailleurs toujours rire quand les stations de radio coupent de manière peu fine dans la moitié des chansons d’artistes américains. C’est pousser un peu loin la bigoterie mais enfin….certainement que ça épargne des milliers de petits francophones d’êtres choqués à vie en entendant  l’équivalant anglais de vilains mots français qu’ils ont déjà appris il y a belle lurette.

Bref la grande question du débat était : la profession d’assistant(e) sexuel(le) peut-il être apparenté à de la prostitution ? On l’aura compris si la réponse était positive, c’était INACCEPTABLE et il fallait s’en indigner (pas que ce soit considéré comme de la prostitution mais que ce soit de la prostitution, nuance). La loi sur le mariage homosexuel étant bientôt de l’histoire ancienne, la rue  et les dimanches pour manifester disponibles, cela donnera tout loisir à tout un chacun de montrer sa désapprobation et donner son avis sur ce qui se passe dans la chambre à coucher d’autres personnes. Oui car on n’aime pas en parler, mais on adore s’en mêler.

Tout cela m’a fait réfléchir et je me suis demandée ce qui moi, dans la multitude de job « to pay the bill » que j’ai fait, me différenciait des prostituées ? Mise à part le fait que si je devenais une prostituée mon tarif horaire serait multiplié par 20, on est d’accord. Qu’est ce qui fait que moi, sous prétexte que je ne me déshabille pas (et encore…), le fait que je donne mon temps pour de l’argent, me rend plus respectable qu’une prostituée ? Ce qui me fait douloureusement penser également que si j’avais eu la présence d’esprit de facturer au tarif prostituée toutes les personnes qui me trouvaient l’amie la plus formidable du monde et qui ont disparu au moment où ils ont compris que l’amitié selon mon dictionnaire n’incluait pas le passage « se voir tout nu », je serais la Baronne Brandstetter 2.0 à l’heure qu’il est.

J’ai fait une multitude de boulots alimentaires, j’ai assisté à beaucoup de choses aberrantes. Des chefs d’entreprise qui exigeaient que leurs secrétaires soient dans leur bureau puant le tabac à la première heure afin de leur servir le café avant qu’ils aient posé leur royal fessier sur chaise. «  Je suis un nostalgique des années 50, bonjour ». De toute manière, prendre sa secrétaire pour une serveuse, est-ce pire que de considérer que c’est une écervelée juste bonne à faire des photocopies et à faire des panneaux créatifs pour indiquer la porte des toilettes, ce qui est à quoi ce résume ce travail dans bon nombre d’entreprise, je vous en laisserai seul juge….

J’ai vu des «petits » chefs, capable de me dire le nombre de fois par jour dans lequel je me trouvais aux toilettes justement… On ne nous paye pas pour aller aux toilettes c’est bien connu, on nous paye pour faire des panneaux qui les indiquent. Cependant quand on s’ennuie farouchement, c’est un haut lieu d’inspiration. Et paye-t-on des gens pour compter le nombre de fois ou d’autres vont aux toilettes ?

Lors de interviews pour ces boulots on me faisait passer de nombreux tests « psychologique » avec des questions aussi fines que « vous avez un problème dans votre travail, que faites-vous ? »

 a. vous êtes un super employé et vous tentez de le résoudre quitte à y travailler des jours des nuits et le week-end

b. vous êtes incompétent, colérique et narcissique donc vous hurlez sur tout le monde avant de claquer la porte (non sans avoir envoyé une lettre menaçant le DRH de mort).

Des questions très dures à déchiffrer n’est-ce pas ? On m’a même prétendu qu’après un test de 50 questions toutes plus débiles les unes que les autres et corrigées par un ordinateur, on pouvait me parler de ma personnalité. Tout un programme… Pourquoi je me suis ruinée en psychothérapie alors qu’un ordi me connait mieux que ma mère nourricière hein ??? J’imagine l’analyse que cela doit donner suite à des questions pareilles. Analyse qui doit aller de « vous êtes qqn de très productif pour nous heu…pardon…vous êtes qqn de bien » à « selon mon analyse psychologique générée automatiquement par microsoft, vous êtes un gros schyzo ». 

On me demandait aussi quel était ma motivation à travailler dans leur entreprise. Quelle autre réponse que « ben…. l’argent…. » vous vient à l’esprit à vous ? Je ne dis pas que c’est la seule raison, je dis que c’est la première que toute personne sensée se doit d’énoncer. Sans blague ! On vous donne 10 millions, vous vous tapez votre réveil matin, les bouchons, et les histoires de week-end désespérément plates de vos collègues vous ? Personnellement pas.

J’en reviens donc à ma question, qu’est-ce qui rend tout cela plus acceptable que la prostitution ?

Et je ne pense pas que cette question se limite au travail alimentaire, ou au travail tout simplement…. Si un jour on me demande d’effacer ou de modifier un passage de l’un de mes textes, est-ce que mes principes rebelles seront toujours d’actualité ? et qu’en est-il des personnes qui restent mariées uniquement parce que leur mariage s’avère être un contrat immobilier mal rédigé et que ça ferait mal de troquer la  BMW contre une twingo? Ou au contraire, des gens qui restent dans des relations où ils vont jusqu’à se renier eux-mêmes sous couvert du mot magique « l’amour » alors que la vraie raison qui les font rester n’a rien à voir de près ou de loin avec un quelconque sentiment amoureux mais plutôt avec la peur pathologique de la solitude ? Quand vous et moi, nous terrons dans une prison que nous avons-nous même contribué à construire, juste parce qu’elle nous donne une bonne raison devant notre manque de courage à avancer, sommes-nous plus vertueux que des prostituées ?

Alors à tous les gens de bonne volonté qui montrent du doigt cette profession si facile à critiquer, je dirais ceci : A un moment de notre vie nous sommes tous putes et soumises quel que soit le maquillage que l’on y mette : le système, l’amour, sa sécurité matérielle. Tous sans exception, nous nous prostituons pour servir nos intérêts. L’accepter c’est faire le premier pas vers la rédemption

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